Déclaration d’Accra agréée par les INDH et les DDH

Déclaration et Plan d’action d’Accra

pour la protection des défenseurs des droits humains agréés par les

institutions nationales des droits humains en Afrique et les défenseurs des droits humains

 

 

Première réunion consultative, tenue à Accra (Ghana) les 5 et 6 décembre 2022


PRÉAMBULE

 

  1. Nous, Participants à la première réunion consultative entre institutions nationales des droits humains (INDH) en Afrique, défenseurs des droits humains et organisations de la soci­é­té civile invités par le Réseau panafricain des défenseurs des droits humains (African­De­fen­ders), le Projet des défenseurs des droits humains de l’Est et de la Corne de l’Afrique (Defend­Defenders), la Commission des droits humains et de la justice administrative du Ghana (CHRAJ) et le Réseau des institutions nationales africaines des droits de l’Homme (RINADH / NANHRI), tenue à Accra (Ghana), les 5 et 6 décembre 2022 ; visant à assurer un suivi à la Déclaration de Marrakech adoptée sous l’égide de l’Alliance mondiale des institutions natio­nales des droits de l’homme (GANHRI) en 2018 ;

 

  1. Rappelant la Déclaration sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et or­ga­nes de la société de promouvoir et protéger les droits de l’homme et les libertés fonda­men­tales universellement reconnus (Déclaration sur les défenseurs des droits de l’homme) de 1998, la Déclaration et Plan d’action de Grande Baie (Maurice) adoptés par la Conférence ministérielle de l’OUA sur les droits de l’homme en Afrique en 1999, et la Déclaration de Kigali adoptée par la Conférence ministérielle de l’Union africaine sur les droits de l’homme en Afri­que en 2003 ;

 

  1. Rappelant en outre la Déclaration de Marrakech et les engagements qu’elle contient en ce qui concerne la protection des défenseurs des droits humains, avec un accent particulier sur la situation des femmes défenseures des droits humains ;

 

  1. Préoccupés par le fait que de nombreuses INDH continuent à faire face à des contrain­tes de financement, à une auto-censure accrue résultant du rétrécissement de l’espace civi­que et de la détérioration de l’État de droit, du manque de respect pour les lois et règle­men­ts, et du manque de consultations publiques et privées avec les organisations de la société civile en lien avec la nomination de leurs membres/commissaires, entre autres défis entravant le fonc­tionnement des INDH ;

 

 

  1. Profondément préoccupés par le fait que de nombreux défenseurs des droits humains continuent à être visés par des attaques de représailles en raison de leur travail en faveur des droits humains, que les auteurs de ces attaques échappent souvent à leurs responsabilités, et que certaines actions étatiques affaiblissent et limitent le mandat constitutionnel, l’auto­no­mie et l’indépendance des institutions nationales des droits humains ;

 

  1. Reconnaissant que les membres et le personnel des INDH sont des défenseurs des droits humains en vertu du mandat qui leur a été confié par les documents constitutifs de ces institutions ;

 

  1. Prenant note de l’engagement des États membres de l’UA, pris dans la Déclaration de Gran­de Baie (Maurice), de mettre en œuvre les dispositions de la Déclaration des Nations Unies sur les défen­seurs des droits de l’homme ; ainsi que des obligations des États parties à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, des Principes de Paris et de la Décla­ration sur les défen­seurs des droits de l’homme de garantir les libertés de réunion, d’asso­cia­tion, de manifestation, et d’expression des défen­seurs des droits humains.

 

 

Sommes déterminés à :

 

  1. Renforcer la relation de confiance entre INDH et DDH en accroissant les échanges visant à promouvoir la connaissance du mandat des INDH, tel qu’établi par leurs docu­ments constitutifs respectifs, les Principes de Paris et la mise en œuvre desdits man­dats en vue de leur compréhension approfondie ;
  2. Reconnaître l’importance de la tenue de consultations régulières, inclusives et subs­tan­tielles entre INDH et réseaux de DDH dans un climat de partenariat mu­tuel, de co­o­pé­ration et de réflexion sincère, de façon périodique ;
  3. Accroître le partenariat entre INDH et réseaux de DDH en vue de promouvoir la mise en place de lois, politiques, réglementations et pratiques progressistes et la ratifi­ca­tion d’instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits humains, dans le but de créer un environnement sûr pour les opérations des organisations de la société civile et protecteur pour les DDH ;
  4. Accroître la collaboration entre INDH et réseaux de DDH afin d’établir et de mettre en œuvre de façon efficace des systèmes solides d’alerte et de protection pour les DDH dans le cadre du mandat des INDH. Des mémorandums d’accord stratégiques, bilaté­raux et/ou multilatéraux, devraient être signés entre INDH et AfricanDefenders/De­fend­Defenders pour servir de guides à ces partenariats ;
  5. Renforcer les systèmes et accroître la capacité des INDH de sur­veiller et de documen­ter les incidents de violations des droits des DDH et de suivre les tendances, dans le but d’assurer des actions de suivi informées par les faits. Les résul­tats des activités de suivi et de documentation des incidents devraient être rendus publics pour davantage de transparence ;
  6. Les INDH devraient établir/renforcer leurs systèmes de gestion des plaintes et d’en­quête afin de suivre les incidents de violations des droits des DDH et tenir des dia­logues réguliers avec les DDH afin d’évaluer leur performance en vue d’identifier les pro­grès accomplis et d’améliorer leurs systèmes ;
  7. Conduire des actions conjointes en vue d’accroître la connaissance, par les respon­sables gouvernementaux et la population, de l’importance des rôles joués par les INDH et les DDH, et en particulier par les femmes défenseures, dans la promotion et la pro­tection des droits humains ;
  8. Les INDH devraient adopter un processus consultatif concernant la publication de leurs rapports annuels et de leurs rapports sur les incidents. En par­­ticulier, en amont de la rédaction de leurs rapports, les INDH de­vraient inviter les DDH et les réseaux et coalitions de DDH à des consul­ta­tions de réflexion afin de recueillir retours et com­men­­taires avant publication des rapports finaux ;
  9. Accroître la coopération au niveaux local/national entre les réseaux/coalitions/orga­nisations de DDH et les INDH. Les INDH sont encouragées en particulier à fournir le sou­tien sollicité par les DDH, conformément à leur mandat ;
  10. Appeler AfricanDefenders/DefendDefenders à fournir l’expertise et le soutien tech­ni­que nécessaire aux institutions nationales africaines des droits humains en vue de la mise en place de mécanismes solides d’alerte et de protection pour répondre aux pro­blèmes rencontrés par les défenseurs des droits humains, notamment en assurant un suivi des tendances et en fournissant des notes d’analyse relatives à des mécanismes de réparation durables ;
  11. Appeler les INDH et le RINADH à fournir le soutien adéquat aux initiatives de litige juridique stratégique (« strategic litigation») entreprises par les DDH/OSC visant à répondre à des problèmes de droits humains, no­tam­ment la fermeture de l’espace civi­que dans certains pays. Ce soutien devrait aussi inclure la soumission de mémoires d’amicus curiae en lien avec des actions judiciaires visant à contester des lois et pra­tiques répressives. L’engagement des INDH et du RINADH à cet égard permettra d’apporter leur expertise et de valider leurs efforts de mise en œuvre de leur mandat de promotion et de protection des droits fondamentaux ;
  12. Appeler AfricanDefenders, DefendDefenders et le RINADH à renforcer leur colla­bo­ra­tion avec les INDH et à répliquer à plus grande échelle leurs efforts de levée de fonds en soutien à des initiatives programmatiques d’INDH et à des consultations et réfle­xions régulières entre INDH et DDH, ceci en vue d’étudier les opportunités et stra­té­gies visant à promouvoir les droits et libertés fondamentaux et la protection des défenseurs des droits humains ;
  13. Appeler AfricanDefenders, DefendDefenders et le RINADH à promouvoir une colla­bo­ration accrue avec les titulaires de mandats et mécanismes en place au sein des systèmes africains de protection des droits humains en vue de faire progresser la promotion et la protection des droits humains sur le continent et de renforcer la pro­tec­tion des DDH, avec un accent particulier sur la protection des femmes défenseures des droits humains, avec due considération pour les dispositions de la Charte africaine et de la Déclaration de Marrakech.

Déclaration adoptée à Accra (Ghana), le 6 décembre 2022.

 

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